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NBA Fan Trip

—  Tu ferais quoi si on gagnait au loto Yael ?

—  On peut gagner sans jouer ?

—  Bon je reformule : Qu’est-ce que tu voudrais faire s’il me prenait l’envie de jouer au loto et si, par le plus grand des hasards, je venais à gagner le gros lot ?

—  Ca fait beaucoup de “si”.

—  Et si tu répondais…

—  J’aimerais aller voir un match de NBA.

—  Et si je te proposais d’aller voir d’aller voir jouer toutes les équipes de NBA, ainsi des équipes de NCAA le championnat de basket universitaire, tout ça en jet privé.

—  Hein ? Vraiment ?

—  Mais oui… enfin si on gagne le très gros lot.

—  C’est malin, tu m’as donné envie d’y aller maintenant

—  L’envie c’est bien, c’est un moteur, inutile de me remercier.

—  Pfff et ça rime à quoi ton petit exercice ?

—  Imagine. Nous sommes sur l’aéroport du Bourget près de Paris et notre Falcon 7X flambant neuf nous attend, on peut même se permettre de narguer le joueur de foot à notre droite qui doit se contenter d’un très médiocre Falcon 2000S…

—  Je ne te connaissais pas ce goût pour les jets privés.

—  Je soigne seulement l’entrée en matière… Nous devons donc planifier notre voyage, il y a 30 équipes de NBA et je te laisse choisir 30 autres équipes du championnat universitaire à condition qu’elles évoluent dans une ville différente de celles de NBA. Ce qui fait que nous allons devoir prendre 60 fois notre jet pour réaliser notre petit voyage.

—  Euh pas tout à fait !

—  Comment ça ?

—  Ben certaines équipes comme les Clippers et les Lakers ou encore les Nets et les Knicks sont dans une seule et même ville.

—  Balivernes, on est blindés, on ne va quand même pas prendre le bus pour aller aux matchs ! Donc on se déplacera en jet même à Los Angeles ou New York.

—  Ben voyons…

—  Cesse ces petites objections qui ne s’appliquent qu’au commun des mortels et poursuivons. Il va nous falloir établir notre plan de vol et ma question est extrêmement simple : Combien de chemins s’offrent à nous ?

—  De chemins ?

—  Oui des chemins, des itinéraires. Nous allons devoir passer par ces 60 villes et comme nous n’avons aucune contrainte financière ni temporelle, nous pouvons nous permettre de joindre n’importe quelle destination dans n’importe quel ordre.

—  Aller à Los Angeles pour voir les Clippers, puis à Brooklyn pour les Nets et revenir à Los Angeles pour les Lakers c’est idiot quand même.

—  On ne peut pas être idiots, on est riches… Alors une idée du nombre de chemins ?

—  Si tu poses la questions c’est que ça doit être beaucoup. Des milliers ? Des millions ?

—  Tu ne pouvais pas être plus éloignée de la vérité. Maintenant compte avec moi. Nous avons combien de choix distinct pour notre première destination ?

—  Ben 60.

—  Parfait !. Et une fois que nous aurons vu le premier match, de combien de choix distincts disposerons-nous encore pour le second match ?

—  59… et 58 pour le troisième, 57 pour le quatrième etc…

—  Exactement. Ce qui fait que nous disposons au final de 60x59x58x57x56x….x4x3x2 choix possibles. On peut noter ce nombre d’une manière beaucoup plus simple, c’est 60! que l’on va lire “factorielle 60” ou “60 factorielle”.

—  Factorielle ?

—  Oui, dans une multiplication tu fais le produit de différents facteurs.

—  Facteurs, Factorielle, c’est noté.

—  Et tu as une idée du résultat de ce produit ?

—  Aucune idée.

—  Prends ta calculatrice ou utilise celle de ton ordinateur et repère le symbole factorielle.

—  Euh je ne comprends pas le résultat.

—  8,32e+81, on peut le noter 8,32.10^{81} mais on va arrondir à 8.10^{81} qu’on peut lire “8 fois 10 puissance 81” c’est à dire un 8 suivi de 81 zéros. Soyons fous je te l’écris c’est : 8 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000.

—  Ah oui, quand même !

—  Tu ne crois pas si bien dire. Ce nombre magistral correspond à une bonne estimation du nombre total d’atomes dans l’univers. Et cela signifie que nous sommes confrontés à un choix pour lequel il existe autant de possibilités que d’atomes dans l’univers connu.

—  Tu voulais faire ton petit effet hein ?

—  C’est réussi ?

—  Plutôt oui mais on ne va pas examiner toutes les possibilités hein ? Rassure-moi.

—  Bien sur que non dans la pratique, mais imagine que nous soyons déraisonnables et que nous désirions trouver le chemin le plus court, ou le plus rapide… Pour s’assurer de trouver le MEILLEUR chemin de la façon la plus primaire possible il nous faudrait examiner TOUTES les possibilités. En informatique on appelle cette méthode la “force brute”, ce qui est assez parlant non ?

—  Bah puisque tu parles d’informatique, ça devrait être facile en utilisant un ordinateur.. Non ?

—  Non

— …

— …

—  Tu me refais un petit effet encore ? Tu va me faire une tête de suspense ?

—  Excuse moi. C’était pour accentuer le côté théâtral de la révélation… La puissance de calcul des ordinateurs même parmi les plus puissants au monde est largement surestimée. Leur puissance est généralement mesurée en FLOPS, Floating point Operation Per Second, ou opération en virgule flottante par seconde.

—  Ca flotte une virgule ?

—  Heureusement que ça flotte, ça permet de les déplacer facilement à droite ou à gauche pour accélérer les calculs. Tiens 120 divisé par 10 ça fait combien ?

—  Ben 12…

—  Tu vois bien que tu l’as fait flotter ta virgule.

—  Quelle virgule ?

—  120 on pourrait tout aussi bien l’écrire 120,00 et en divisant par 10 tu as déplacé la virgule sur la gauche comme tu l’as si bien appris ce qui nous donne 12,000 que, pour simplifier on va noter simplement “12”.

—  Et on va quelque part avec ça ?

—  C’est toi qui m’a interrompu, tu ne vas pas me reprocher de répondre à tes interrogations quand même ?

—  Et tes flops, ils mènent quelque part ?

—  Mes flopSSSS me permettent de définir la puissance d’un ordinateur. Les plus puissants supercalculateurs au monde affichent une puissance de 30 peta-flops soit 30.10^{15} flops soit 30 millions de milliards d’opération par seconde.

—  Et ça ne suffit pas ?

—  On est très loin du compte. Pour simplifier les calculs imaginons qu’on ait un supercalculateur de 80 peta-flops soit 80.10^{15} flops et que chacun de nos chemins ne nécessite chacun qu’un seul et unique calcul. Combien nous faudrait-il de temps pour faire 80.10^{80} calculs avec un super ordinateur de 80.10^{15}  flops ?

—  Euh tu veux vraiment que je fasse le calcul ?

—  Le calcul est plutôt simple. Si tu as 100 000 opérations à faire et que tu disposes d’un ordinateur qui fait 1000 opérations par seconde, combien de temps te faut-il ?

—  Bah là c’est plus simple 100 000 divisé par 1000 ça fait 100.

—  100 quoi ?

—  euh… 100 secondes ?

—  Tout à fait ! Soit moins de 2 minutes. J’aurais très bien pu écrire 10^{5} à la place de 100 000 et  10^{3} à la place de 1000. El le résultat, 100, est égal à  10^{2}  soit  10^{5-3} .

—  Et je peux faire la même chose avec tes nombres ?

—  Exactement, tu peux manipuler avec ton esprit des ordres de grandeurs qui dépassent le nombre d’atomes dans l’univers. Tu vois comme tu es futée ?

—  Arrête ! Donc si j’ai bien compris 80.10^{80} calculs en faisant 80.10^{15} calculs par seconde ça nous donne 10^{80-15} soit   10^{65} secondes… Eh mais c’est encore beaucoup trop !!!

—  Oui bien trop. Je t’épargne le calcul mais il y a un peu plus de 30 millions de secondes dans une année soit  3.10^{7} ce qui fait que nos  10^{65} secondes correspondent à un peu plus de 3.10^{57} années soit 3000 milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards d’années. Et même en imaginant. qu’on puisse utiliser simultanément un milliard d’ordinateurs mille fois plus puissants que ceux qui existent actuellement on ne ferait que diviser le temps nécessaire par 1000 milliards soit 10^{15} , ce qui nécessiterait encore 3.10^{42} années.

—  Et on ne peut pas trouver de solutions plus rapidement.

—  On connaît des méthodes ou plus précisément des algorithmes “rapides” pour ce type de problème mais ils ne nous assurent pas de trouver systématiquement la meilleure solution. Pour tout dire on ne sait même pas si un algorithme rapide permettant de trouver la solution optimale existe. Cela fait même partie des sept problèmes mathématiques considérés comme insurmontables et qui constituent le prix du millénaire.

—  Tu vas y ajouter un huitième.

—  Hein.. Lequel ?

—  Comment on va faire pour aller voir ne serait-ce qu’un seul et petit match de NBA ?

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