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L’économie expliquée à ma fille – Partie 4 Demain

Episode précédent – Décider et survivre

—  Demain ?

—  Demain.

—  Et c’est tout ?

—  C’est déjà beaucoup Yael. Demain c’est anticiper un autre monde, demain c’est s’extraire de sa condition actuelle, demain c’est croire.

—  Tu n’en fait pas un peu beaucoup quand même ?

—  Si. Mais c’est fait exprès. Regarde notre Robinson…

—  Il a le teint plus rose, c’est bon signe non ?

—  C’est encourageant. Il a réussi à subvenir à ses besoins immédiats. Pour l’instant il consomme ce qu’il produit. Il se nourrit essentiellement de quelques végétaux que, par chance, il arrive à identifier. Toutefois cette manne ne va pas forcément durer et cela le pousse à cogiter. La survie au jour le jour, ça va un moment mais là il pense à demain. Il sait qu’il va être là pour un moment et il cherche à diminuer l’incertitude qui le ronge.

—  Et la pêche alors ? Tu ne parlais pas d’un lagon ?

—  Il y pense bien évidemment. Mais il doit se résoudre à faire encore un choix ou un arbitrage comme aiment à l’appeler les économistes.

—  Quel choix ? Un bâton, un bon petit coup sur la nuque du poisson et miam !

—  Sincèrement… il va falloir arrêter avec les coups sur la nuque. En plus je ne suis même pas sûr que les poissons en soient pourvus. Quoi qu’il en soit, Robinson est plus avisé que ça, il sait pertinemment que, baton ou pas,  ses chances de succès en l’état son minces.  Il pense par contre essayer de fabriquer une nasse avec les moyens du bord, c’est à dire quelques feuilles de palmier, mais il hésite…

—  Pourquoi hésiter ? Il n’a rien à perdre.

—  Oh que si. Tout le temps passé à réaliser cette nasse à l’efficacité incertaine, c’est autant de temps qu’il ne pourra pas passer à faire ce qui, pour l’instant, assure sa survie : chercher des aliments sur l’île. Fabriquer cette nasse, c’est un détour de production, c’est renoncer au présent, c’est renoncer à une production qui permettrait une satisfaction immédiate dans l’espoir d’améliorer sa condition future. En économie ça porte un nom.

—  Un pari ?

—  Presque. Un investissement. On pourrait même ajouter un investissement matériel puisqu’il contribue à la réalisation d’un bien corporel, palpable, tangible, une ridicule petite nasse.

—  Bon et il la fabrique ou non alors cette nasse ?

—  Comme tu veux.

—  Hein c’est moi qui décide ?

—  Oui, Robinson c’est un peu notre sims à nous. on peut le pousser à faire des choix que, pour l’instant il rechigne à faire.

—  Nasse ou pas nasse ? on dirait un sims version zéro ton truc quand même.

—  C’est écolo, ça ne consomme que les glucides que tu as avalé ce matin.

—  Bon, ça marche comment ? J’appuie où ?

—  Tu le dis à haute voix c’est tout.

—  Bon… Robinson fabrique une nasse… Voilà voilà… C’est tout ? C’est fait ?

—  Impec. Regarde-le Yael, il a l’air plutôt fier de sa réalisation.

—  Je crois que c’est son premier sourire depuis qu’il a débarqué sur l’île.

—  Pourtant il n’est pas au bout de ses peines. Il va devoir en passer du temps pour apprendre à manipuler sa nasse, pour acquérir de l’expérience… ce qui constitue justement une autre forme d’investissement, un investissement dit immatériel qui contribue à augmenter le capital humain qu’on avait déjà évoqué précédemment.

—  C’est plutôt maigre.

—  C’est un début. Grâce à la nasse et à son expérience, deux expressions du capital que Robinson a contribué à former, l’efficacité de son travail va s’en trouver améliorée. On pourrait déjà se poser la question de ce qu’il reste du capital naturel de l’île afin de voir si sa situation s’est véritablement bonifiée mais on garde cette question qui amènera cette du développement durable pour plus tard.

—  Il va survivre alors Robinson ?

—  Il a l’air bien parti pour.

—  Tant mieux, je commence à m’y attacher.

—  Oh toi tu ramènerais tous les chats galeux du monde si tu pouvais.

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